A la station de ski Montchavin-Les-Coches, située à 1450 mètres d’altitude dans les Alpes, Gilles R et sa famille s’installent pour un séjour d’une semaine dans un appartement loué. Très grande station de ski habituellement remplie de monde en cette période de l’année, c’est sans surprise que l’on découvre Les Coches bien plus vide que d’habitude. Ses terrasses de restaurants ainsi que ces bars, qui offrent une vue imprenable sur les versants sud des montagnes, sont désormais occupés par des fantômes. Les fantômes des vacanciers qui étaient là, assis au même endroit un an plus tôt, alors que la crise sanitaire en France venait tout juste de débuter. Le temps d’attente dans les établissements de réservation et de location de matériels n’existe presque plus. Gilles, habitué de la montagne, peine à se rappeler du temps où il fallait attendre de très longues minutes avant qu’on le prenne en charge. Avec un regard nostalgique, il repense au bonheur que lui apportait les sessions de ski alpins avec sa famille sur les pentes noires, rouges, bleues et vertes.
Mais tout n’est pas mauvaise nouvelle durant ce séjour, bien au contraire. Tout au long de la semaine, un temps idyllique a accompagné les vacanciers à travers leurs diverses activités. En effet, malgré la fermeture des remontées mécaniques, et la fermeture de certaines pistes de ski, la famille a pu profiter de la montagne de différentes manières. Il fallait cependant réserver longtemps à l’avance les activités, et Emilie, la femme de Gilles R, a dû faire des réservations un mois à l’avance. Malgré toutes les précautions de la famille, une semaine avant leur départ, certains établissements n’ont pas pu prendre en compte les demandes de réservations, et certaines activités, notamment la balade en chiens de traineau, sont passées à l’oubliette. Lorsque l’on se rend directement sur place pour réserver une activité, l’on apprend que les saisonniers ne sont pas employés, et que très peu de personnes sont capables d’accueillir les vacanciers. Mais la famille R a plus d’un tour dans son sac afin de passer d’excellentes vacances d’hiver.
Je n’ai pu les rejoindre qu’en milieu de semaine, et les vacanciers m’ont raconté avec enthousiasme les premières journées de leur séjour. Les après-midis des deux premiers jours de la semaine, les trois enfants de la famille et leurs amis ont pu profiter de cours de snowboards, pour un total de 3 heures d’initiation. La matinée, c’était rendez-vous pour une randonnée en raquettes, activité découverte : « Nous avons loué les raquettes nous-même, et nous avons marché un peu au hasard dans la forêt. […] Les raquettes sont très utiles pour le hors-piste » explique Gilles après sa session. Une activité raquette ayant comme thème Chamallows Grillés est d’ailleurs prévue avec un guide pour la journée de vendredi, dernier jour d’activité du séjour. C’est l’activité surprise de la semaine, et les enfants ont déjà hâte d’y être.
Mercredi, tout le monde se réunit, familles et amis sont au complet afin de partir en randonnées. Les enfants et les adultes, équipés de leurs surfs sur le dos et les plus jeunes de luges, partent en randonnées sur des chemins particuliers. Des pistes spécifiques sont encore ouvertes, allant de la station de ski Les Coches jusqu’à celle d’en dessous, Montchavin-Les-Coches. Cette station propose un service de navettes qui remonte les vacanciers. Les Coches est la seule station du domaine qui propose ce genre de navettes, ce qui ravit les plus flemmards. Mais la distanciation sociale dans un si endroit si étroit n’est pas au rendez-vous. Ce n’est pas tellement un problème pour la famille, qui ne se mélange pas avec d’autres vacanciers. Avec une navette tous les trois quart d’heure, c’est pile le temps pour descendre la piste et faire une bataille de boules de neige. En ce qui concerne les plus courageux, ils décident de remonter les pistes eux-mêmes, uniquement armés de leurs jambes et de leur détermination. L’activité est épuisante : entre amusement et sport, une fois rentré à l’appartement, tout le monde s’écroule. Les pistes étaient remplies en permanence, car les vacanciers essayaient de nouvelles activités eux-mêmes, notamment le snowboard. Durant toute la journée, nous avons pu observer plein de personnes monter les pistes à pied et les descendre en snowboards. Il y avait de nombreux débutants sur les pistes.
Entre repas pris dans un snack sur les chemins de randonnée et sport, la journée du jeudi est aussi bien chargée. En effet, les restaurants de la station sont bien fermés, mais les snacks profitent de la rapidité de leur service afin de rester ouverts. On peut s’attrouper debout, autour d’une petite table ronde au centre de la terrasse afin de boire un verre et manger rapidement. La distance de sécurité de deux mètres entre chaque personne est correctement respectée par tout le monde, et l’endroit n’est jamais sur-rempli. Une fois servie de leurs barquettes de frites et de leurs sandwichs préparés à l’avance, la famille s’écarte un peu du monde présent afin d’aller manger au calme un peu plus loin, assis dans la neige.
Au niveau des restrictions sanitaires dans la station, « tout est bien plus respectés qu’ailleurs », indique le responsable d’un bar. Les petits commerces, les épiceries et supérettes accueillent un nombre limité de personnes et ferment à 18 heure au plus tard, afin de respecter le couvre-feu national. Ces mesures sont parfaitement respectées car des rondes de gendarmes municipaux sont faites en permanence afin de vérifier que le couvre-feu est bien respecté et que les vacanciers suivent correctement les consignes, inscrites sur les panneaux à l’intérieur des établissements. Même les boutiques de souvenirs sont encore accessibles, avec les mêmes mesures que pour les commerces. En rentrant dans un SPA (commerce généraliste de montagne) on peut observer certains employés réprimander des vacanciers qui sont rentrés en trop grand nombre à la fois.
Avant de partir, la famille s’offre un dernier petit plaisir, et se rend sur les pistes de luge de la station. Enchaînant les descentes, les éclats de rires des enfants résonnent jusqu’en haut de la pente. A côté de moi, Thimoté observe avec attention une grand-mère faire des descentes en luge avec ses petits-enfants, et s’exclame de leur agilité. Ce n’est pas la seule grand-mère en pleine forme qui pratique cette activité, et on peut voir de nombreuses personnes âgées qui s’amusent à glisser à pleine vitesse sur la poudreuse.
Pauline, Elise et Thimoté, les trois enfants de la famille, ne regrettent en rien leur séjour. « Même si ce n’était pas comme d’habitude, on ne s’est jamais ennuyés, et on voit la montagne autrement que les autres années, surtout avec les raquettes, les randonnées … J’ai tout aimé faire ». Explique Pauline, l’ainée. « J’ai pu faire plein de nouvelles activités et j’ai appris à faire du surf ! Je t’apprendrais si tu veux Camille ! » S’époumone Thimoté le cadet de la fratrie. En ce qui concerne les parents, l’avis est unanime, ils « avaient bien besoin de changer d’air. […] C’était excellent, parce que les enfants ont découvert le surf ». Bien évidemment, avec le contexte sanitaire actuel, ce n’est pas seulement les activités qui changent, mais aussi la vie quotidienne, rythmée par des mesures sanitaires strictes, même en montagne.